18/11/2012

542. Le ciel gris, ce matin

Le ciel gris, ce matin, dénoue
Son frais collier de gai cristal :
La pluie est un soleil qui joue
Avec des rayons de métal.

Le printemps, comme une arche, flotte
Sur les eaux nombreuses, et l'air
Dans ses bonds allègres cahote
Un parfum incisif et vert.

Les branchages, à chaque ondée,
Entendent respirer plus fort
Et se tendre le frais ressort
Des pousses fermes et bondées.

A travers ces préparatifs
De feuilles, do graines, de baumes,
Les oiseaux glissent, légers, vifs,
Rapides comme des arômes.

— Gais oiseaux annonciateurs,
Dont le cri bourgeonne et verdoie,
Vous savez, sous l'eau qui vous noie,
Que le sol est gonflé d'ardeur!

Vous baignez, étonnés, timides,
Et pleins de pépiements joyeux,
Dans les rais de la harpe humide
Qu'est le mol éther pluvieux !

Vous hissez vers vos courtes ailes,
Vers vos cols dépliés d'amour,
Les chétives plantes nouvelles
Qui font l'ascension du jour.

Menue, adroite et vigilante,
La pluie est une âme au jardin ;
Sa danse éparpillée argenté
L'atmosphère couleur d'étain.

Pleurs de joie, amoureux baptême,
Tintillement preste et joyeux !
La nue, active et fraîche, sème
Un blé transparent et frileux.

Et puis ce beau jet soudain cesse :
Tout est paisible, frais, câlin ;
Partout des gouttes d'eau se pressent
Comme un fin muguet cristallin.

L'atmosphère est mouvementée :
De courtes brises, dans l'éther,
Clapotent, mollement heurtées
Contre le cap des rameaux verts.

Les vents légers s'enflent, s'abaissent ;
Que de grâces, de politesses !
J'accueille, dans mon cœur ouvert,
Ces salutations de l'air...

Les Forces Eternelles