10/02/2012

443. Conte triste. 22

22. Révélez-vous progressivement, et de lustre en lustre, à quelques-uns de ces humains prédestinés qui vous pressentent dans les transes, et qui ne trembleront pas d'épouvante devant votre nudité redoutable qui est l'écorce du monde, qui a l'aspect du primitif chaos en même temps que du terme des choses. Ô Vérité sans voile, vous qui êtes ce qui est, divinité unique, - évidence, logique, destin, fatalité, - vous représentez l'immense arène où tout a combattu et combattra. Je vous contemple avec vénération, ô Vérité limpide: sang des justes, imploration de tous ceux qu'on lèse, soupirs des calomniés, yeux hébétés de celui à qui l'on nuit, regard des novateurs, gémissements de l'espoir motivé et vaincu, angoisse de l'expérience différée, de l'exactitude qu'on méconnaît ...
Ô Vérité, promesse de tous les maux, certitude de l'agonie, annonciatrice de la mort, je vous vénère et je vous loue. Impétueuse, qui construisez l'avenir, niais qui, serrée parmi la foule des causes et des circonstances, ne pouvez avance!" d'un pas sans que l'aient autorisé ce qui vous précède et ce qui vous suit, soyez bénie, esclave au front libre! Puisque nous vous avons évoquée, demeurez encore un instant, ô Vérité sans nul voile, auprès de vos partisans stoïques. Ne nous quittez pas avant d'avoir entendu de notre bouche ces mots d'amour: « Si cruelle que tu sois dans tes cruels moments, je t'aime, parce que le mal que tu me fais est conforme à la compréhension que j'ai de toi. Nécessité, qui est inéluctable et pleine de preuves, je t'aime parce que tu m'as choisie pour le savoir; je te remercie de m'avoir jugée digne. Et quand, en ce moment même, par ta présence persistante, s'écroulerait tout ce qui me favorise et me flatte, tout ce qui me préserve et me maintient, je. n'interromprais pas mon chant d'amour, et je te dirais: « Je t'aime, parce que tu es la Vérité !