19/11/2012

560. Nuit d'été obscure - Tu n'as pu croire à rien - Pensée dans la nuit

NUIT D'ÉTÉ, OBSCURE.


Nuit d'été, obscure et sans bruit,
Prodigue de fraîcheur limpide !
L'infini Destin se dévide
Lentement. Une étoile luit.

La nuit, le silence, une étoile.
Un plaintif humain soucieux
Qui, levant un store de toile,
Contemple la longueur des cieux

Et gémit d'être, dans l'espace.
Malgré les forces de l'esprit.
Une ombre chétive qui passe.
Dont nul astre n'entend le cri,

Voilà l'indicible problème
Que pose au ciel, comme une fleur,
Cette pure étoile que j'aime.
Et c'est l'angoisse dont je meurs...

TU N'AS PU CROIRE A RIEN...

Tu n'as pu croire à rien, mais tu fus inquiet,
C'est là l'honneur humain et le regret des ailes,
Ton âme, façonnée aux choses éternelles.
N'a pu sans désespoir accepter ce qui est.
Pourquoi t'obstines-tu ? Qui veux-tu qui réponde ?
Laisse tomber tes bras, garde tes jeux ouverts,
On ne doit pas saisir, mais aimer l'univers.
Si fort que ton regard puisse tendre sa fronde
Tu n'atteindras jamais que le muet désert
Des cieux distraits et fiers dont la clarté t'inonde.
N'interroge plus rien. Déjà voici la mort
Qui fait cesser soudain, sous ses paumes profondes
Habiles à briser tous les vivants ressorts.
Le monstrueux combat de l'esprit et des mondes...

PENSÉE DANS LA NUIT

L'averse communique à l'air un goût marin,
Le vent frémit ainsi qu'une immense flottille,
La lune entrouvre aux cieux un aileron d'airain,
Une étoile endormie à peine brille et cille;
Et je respire avec une ample volupté
Cette verte, élastique et fraîche crudité
Du feuillage content, qui, comme un hymne, élance
La pure odeur de l'eau dans le puissant silence !

Tout repose, l'air est mouillé comme une fleur,
Chaque point de l'éther tranquillement s'égoutte,
Un vent plus vif répand sa subite candeur;
Je suis là, faible humain, je contemple, j'écoute.
Le vent noir vient à moi, et dans mon souffle heureux
S'élance avec l'odeur des torrents et des cieux.
Et mon cœur se dilate, et l'infini pénètre
La tristesse attentive et sage de mon être.
Je songe aux morts, je goûte avec austérité
La vie, et ce puissant, régulier délire
Qui, depuis l'humble sol jusqu'aux astres sacrés.
Étend l'acte divin et fier de respirer;
Et les morts sont sans souffle, et dans leur sombre empire
Jamais plus ne descend ce grand ciel aéré
Qui m'accoste et m'imprègne.
O Monde, je respire !

Les Forces Eternelles